Live Report Bikini – Breakbot, Pyramid, Dabeull…
Neuf jours après avoir quitté le Bikini et les ondes ensorcelantes du groove de l’Impératrice, nous étions de retour, le 20 février dernier, dans la salle de concert de Ramonville pour assister à l’une des programmations les plus prometteuses de ce début d’année 2016. En effet, les organisateurs avaient vu les choses en grand pour cette soirée placée sous le signe de la musique funk et du disco, en invitant Breakbot, le roi de l’électro-funk, à venir se produire sur scène et présenter son tout nouveau live et son nouvel album Still Waters pour la première fois à Toulouse. Ils avaient également misé sur des valeurs montantes de la scène électro Française en programmant LA révélation newfonk de l’année 2015 en la personne de Dabeull, le producteur Lyonnais Pyramid, mais aussi les locaux Mangabey et La Petite Grande, du collectif Boussole Records. De mémoire, nous n’avions pas passé une telle soirée au Bikini depuis bien longtemps. Amnusique revient, pour vous, sur les temps forts de ce samedi soir de folie…
☾ 23:15/00:30 – La Petite Grande – Deux petits qui ont tout pour devenir de futurs grands
Notre soirée au Bikini débute sur les chapeaux de roues avec le set puissant et survolté concocté par La Petite Grande. Sous ce nom à consonance féminine se cachent en réalité deux jeunes producteurs Toulousains faisant partie du collectif et label « Boussole Records ». Certes, ce n’est qu’un détail, mais l’un des deux membres de La Petite Grande marque très vite des points pour sa formation, de par son choix d’arborer sur scène un t-shirt à l’effigie d’un autre duo que l’on affectionne, celui des Australiens de Flight Facilities (en même temps, comment ne pas être fan de leur Crave You). Bref, outre cet aspect vestimentaire pas vraiment déterminant mais qui prouve le bon goût musical des artistes présents sur scène, c’est surtout le set en lui-même qui aura su nous séduire durant la totalité des 45 minutes qui étaient dédiées au duo Toulousain ce soir-là.
Sur l’estrade, les deux jeunes artistes envoient du lourd. Les morceaux nu-discos et électros qu’ils distillent s’enchaînent parfaitement, ils sont percutants, dansants et ultra-motivants pour les cinq prochaines heures qu’il nous reste à passer dans l’enceinte du Bikini. Pas besoin d’être rond comme une queue de pelle pour danser grâce à ces deux-là. Et si les deux membres semblaient assez timorés en début de démonstration, ils se sont affirmés davantage au fil du set, bien aidés par un public chaud bouillant venu les soutenir en nombre. En dernière partie de leur prestation, les Toulousains (très certainement désinhibés par les quelques canettes qu’ils ingurgitaient derrière leurs platines) finiront même par prendre l’assurance tant espérée et enfin interagir avec la foule. La Petite Grande était vraiment l’entrée en matière idéale avant l’arrivée des têtes d’affiche que sont Breakbot, Dabeull et Pyramid. Les deux producteurs devront tout de même travailler un poil sur leur complicité et leur communion avec le public. Nous aurions espéré un peu plus d’interactions, de regards et d’échanges avec nous mais tout cela devrait venir avec l’expérience.
☾ 00:30/01:15 – Mangabey (Live) – Une transition en douceur
Après le premier set de la soirée, place au premier live. C’est le Toulousain Mangabey, un autre poulain de chez Boussole Records, qui s’y colle. Celui-ci a la lourde tâche de succéder au set décoiffant de La Petite Grande et, surtout, de chauffer le public avant l’arrivée du roi Breakbot, la véritable attraction de la soirée. Ce qui, disons-le, n’est pas une mince affaire. Contrairement à ses prédécesseurs, Mangabey débute sa prestation beaucoup plus en douceur, certainement canalisé par les contraintes que lui impose ce type de live. Résolument plus orientée house que nu-disco, sa musique met clairement beaucoup plus de temps à atteindre son point culminant, et donc par conséquent, à faire danser l’assemblée. Tout au long des 45 minutes de lives qu’ils nous avaient élaborés, Mangabey et ses machines bringuebalent le Bikini entre de délicates phases aériennes et des montées plus remuantes vraiment chouettes. Ce contraste entre les sonorités nous amène à nous demander s’il n’aurait pas été plus judicieux de placer l’artiste en toute fin de line-up, afin de terminer la soirée sur une note plus apaisante et éviter la coupure dans son style musical général. Malgré cette petite réserve, l’exercice du live est pleinement réussi et l’on a pris du plaisir à observer le producteur bidouiller sa bécane en direct pour composer sa musique.
☾ 01:15/02:55 – Breakbot (Live) – Le funk et le disco sont morts, vive le funk et le disco !
Image d’illustration © Brice Robert
C’est enfin l’heure du show Breakbot et le public ne s’y trompe pas. On observe ainsi un afflux massif de spectateurs venus envahir les abords de la scène qu’allait fouler le roi de l’électro, du funk et du disco, d’ici quelques minutes. Cela fait maintenant 6 ans que nous suivons les aventures de Breakbot, nous l’avions déjà vu en concert (DJ Set) au Bikini à deux reprises, et une fois au Zenith, c’est donc avec une certaine impatience et une excitation sans équivoque que nous attendions de découvrir ce tout nouveau live et d’enfin voir Thibaut évoluer sur scène avec de vrais musiciens et des chanteurs. Toulouse était seulement la cinquième représentation de cette nouvelle formule « Still Waters Tour » à 6 têtes (rappelons-le, Thibaut Berland est dorénavant accompagné par son ami Irfane, la chanteuse Yasmin, ainsi qu’un bassiste, un guitariste et un batteur) nous pouvions donc aisément imaginer que la ville Rose faisait encore office de rodage. Mais que nenni. Nous aurions dû nous en douter, lorsque Breakbot entreprend quelque chose, il ne le fait pas à moitié, il le peaufine, il le façonne et il le magnifie.
Premier constat positif de taille (c’est le cas de le dire), les artistes sont surélevés sur la scène, les personnes de hauteur minime pourront donc assister à l’ensemble de la prestation beaucoup sereinement. Le live est lancé, il débute plutôt calmement avec Thibaut qui nous gratifie de ses premiers morceaux, perché sur l’estrade et penché sur synthé, avant que le rouleau compresseur à tubes ne se lance véritablement. Il faut bien l’avouer, au premier coup d’œil, tout est ultra-kitsch scéniquement parlant. Des décors, aux tenues, en passant par les lumières, tout est old-school. Et pourtant. Breakbot et sa troupe ont l’incroyable don de sublimer ce côté démodé et d’en faire une force indéniable. Le parti pris est foutrement gonflé mais tellement réussi, tellement prenant, tellement parfait.
Comment ne pas évoquer Irfane, muni de son micro à la Philippe Risoli et vêtu de sa tenue à la ABBA, du pantalon blanc immaculé à pattes d’eph de Breakbot, ou encore des motifs psychédéliques projetés sur scène qui ont toutes les caractéristiques des ces 70’s et 80’s archaïques mais qui, au contact de la musique de ses six artistes d’exception présents sur les planches, flirtent avec l’élégance et le bon goût. En effet, ce qui fait la force de Still Waters Live c’est cette faculté qu’a eue la troupe de réutiliser tous les codes d’une époque révolue, souvent moquée, pour en faire quelque chose de léger, de lumineux et de charmant. Tout au long du live, le public prend un plaisir fou à retomber dans ces années discos baignées par les paillettes, les couleurs et les boules à facettes. Absolument toute la fosse se trémousse, danse, chante sur les classiques de Breakbot qui retentissent et sur quelques-uns des nouveaux morceaux qui forment son nouvel album Still Waters, sorti seulement quelques semaines auparavant.
Après s’être délecté des Baby I’m Yours, One Out Of Two, Get Lost, My Toy, 2Good4Me ou encore Back For More (il n’y a vraiment que des tubes)… vient l’heure de l’apothéose lorsque Breakbot décide de nous envoyer sa version revisité de son propre remix de Kiss To Kiss, de The Swiss, en pleine tronche. Dieu que c’était bon. Ce Still Waters Tour n’a que quelques jours de vie, et pourtant, il est rodé et millimétré comme si Breakbot l’avait joué depuis des années. La fusion entre les membres du groupe est sensationnelle et tout le monde semble avoir trouvé sa place. Le duo Irfane/Yasmin marche comme sur des roulettes et l’apport du guitariste, du bassiste et du batteur est indéniable. Chapeau monsieur Breakbot, l’essai du live est transformé, on en redemande. Après une telle performance, on se dit alors qu’il faudra bien du courage à Dabeull pour laisser la soirée sur son niveau d’excellence, voire de perfection, actuel… Nous retrouverons Breakbot et sa troupe avec grand plaisir lors du Cabaret Vert en août prochain.
☾ 03:10/04:25 – Dabeull – Double lobe, double cœur
David Saïd aka Dabeull est un producteur de musique électronique (musique qu’il qualifie de « NewFonk »), qui évolue au sein de l’écurie Française Roche Musique, aux côtés de Darius, Kartell, FKJ, Zimmer et consorts. Nous avions connu ce moustachu atypique, il y a tout juste un an, par le biais des vidéos « inDAstudio » qu’il publiait chaque vendredi sur sa page Facebook. Curieux, nous étions alors partis explorer son univers musical et avions prêté l’oreille à son excellent premier EP « Fonk Delight » ainsi qu’à ses quelques morceaux et mixtapes postés sur Soundcloud. Cet univers dansant et festif nous avaient rendu totalement accros à son travail, nous ne pouvions donc pas passer à côté de set, c’était une question d’honneur. Une question de fonk ou de mort.
Il est un peu plus de 3h lorsque Dabeull entre dans l’arène. Celui-ci fait face à une foule un peu moins dense que celle présente lors du passage de ses prédécesseurs (beaucoup étaient venus voir Breakbot sans connaître les autres artistes) mais qui reste tout à fait honorable pour l’heure plutôt tardive. Dès les premières notes, le charme opère. Les mélodies du Parisien envahissent nos esgourdes, la puissance des bass vient nous claquer le thorax et une irrésistible envie de se tortiller s’empare alors de nous. Sous son imposante moustache à la Magnum, David affiche un large sourire hyper communicatif qui fait un joli pied-de-nez à la poignée de DJ qui tirent une gueule de six pieds de long durant leurs sets. Et en parlant de pieds, il est clair que nous prenons le nôtre, voire même les deux. L’artiste nous gratifie régulièrement de petits hochements de tête, que l’on appellera « la danse du pigeon », de petits pas de danse et de play-back sur les paroles et les instrus de certains titres, qui nous feront décrocher à plusieurs reprises des rires non dissimulés. Nous le connaissons à peine mais nous aimons déjà ce mec. À travers sa musique et sa bonne humeur, Dabeull nous transmet une véritable émotion et un bien-être suffisamment rare pour être souligné.
Armé de sa trackslist dansante mêlant ses propres morceaux (New Order feat. Holybrune) reprises électros et incontournables des années 80 comme Bill Withers ou Michael Jackson, le Parisien nous livre un set de haut vol qui nous ferait presque oublier le live précédent. La fosse se remplit d’ailleurs un peu plus au fil des minutes et se transforme en piste de danse géante funky et disco. Chacun des spectateurs se laisse bercer par les sonorités 70’s et 80’s chaleureuses et crépitantes que Dabeull nous a concoctées avec amour. Le mot amour est certainement celui qui convient le mieux pour définir la prestation du producteur. Pas besoin d’être Brigitte Lahaie pour comprendre la passion qu’entretient David pour la musique et le plaisir fou qu’il prend sur scène. Après un peu plus d’une heure d’intense fièvre et de réjouissances, Pyramid, le dernier à se produire ce soir, vient relayer le protégé de Roche Musique, qui s’est révélé être notre gros coup de cœur de cette soirée.
Pour conclure sur Dabeull, nous voulions juste passer un petit coup de gueule concernant le démontage du décor du live de Breakbot. Nous nous doutons qu’il s’agit de quelque chose qui prend du temps, mais, le réaliser pendant la prestation de l’artiste qui suit est une erreur grossière qui flirte avec le manque de respect pour celui-ci. Soyez gentils, la prochaine fois, mettez un rideau. Les chariots élévateurs et les techniciens qui font des allers et venus en fond étaient de trop. Bravo à Dabeull pour son professionnalisme et qui n’a rien laissé paraître malgré les deux mecs qui s’agitaient et gesticulaient constamment derrière lui.
☾ 04:25/05:40 – Pyramid – Une fin de soirée comme on les Hathor
C’est sur une transition juste géniale que Dabeull et Pyramid se transmettent le flambeau. Étienne Copin aka Pyramid a pour mission de conclure cette sauterie, déjà si riche et inoubliable, grâce à son répertoire électronique pointu et enivrant. Malgré la fatigue qui commence à se faire ressentir, le set frais et pêchu du Lyonnais, que l’on avait connu grâce à ses morceaux Sleeping Fox, Cosmos, The Race ou encore Astral, nous pousse à rester quelques minutes de plus dans la fosse, encore vraiment bien garnie à un peu plus d’une heure du coup de sifflet final. Chauffé et motivé par les artistes déjà passés sur le gril, le public est toujours aussi réceptif et remue toujours autant, au rythme des morceaux servis sur un plateau par Pyramid. Le producteur reste tout d’abord dans une musique assez proche de celle de Dabeull avant de retrouver son style caractéristique, beaucoup plus aérien et électrisant.
C’est avec regret que nous quittons la salle, aux alentours de 5h de matin. En plus de 7 ans de fréquentation intensive du Bikini, il faut bien l’avouer, cette soirée était certainement l’une des meilleures que nous avions vécues jusque-là. La line-up était tout simplement impeccable, les artistes nous ont régalé du début à la fin et l’ambiance générale était plutôt bon enfant. Cette séance de presque 6h d’affilée restera, à n’en pas douter, pour très longtemps dans nos mémoires. On termine en remerciant Because Music pour l’invitation.
Publié par : Guillaume, Catégorie(s) : Analyses et reportings, Concerts
Graphiste et illustrateur dans une agence de communication le jour, administrateur et rédacteur web la nuit, Guillaume est le fondateur du site Amnusique.
Sa plus grande fierté ? Il est Carolomacérien. Sa plus grande honte ? Il a possédé (et écouté) l’album de K-Maro durant son adolescence. L’artiste le plus présent de sa playlist ? Très certainement Parov Stelar.